DPE erroné ou falsifié : comprendre les dérives, leurs impacts et comment les éviter

Le diagnostic de performance énergétique (DPE) est un document incontournable pour vendre ou louer un logement. Il informe sur la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre du bien et, depuis 2021, son contenu engage la responsabilité du propriétaire. Malheureusement, des fraudes et incohérences, qu’elles soient volontaires ou non, entachent parfois les DPE. Tour d’horizon des différents types de fraudes et d’erreurs que l’on peut rencontrer, ainsi que de leurs conséquences pour les propriétaires, locataires et professionnels.

Fraudes volontaires : le DPE de complaisance

Certaines fraudes sont intentionnelles. On parle de DPE de complaisance lorsque le diagnostiqueur attribue sciemment au logement une meilleure note énergétique qu’il ne le devrait, souvent sous la pression du propriétaire. L’objectif est clair : franchir artificiellement un palier de classe énergétique pour éviter les contraintes associées aux mauvais élèves. Par exemple, reclasser un logement de F en E permet d’éviter le statut de passoire thermique (les logements F ou G subissent des interdictions progressives de location et une décote sur le prix de vente). Les motivations sont financières et réglementaires : un meilleur DPE permet de vendre plus cher (on estime à 8–10 % la différence de prix entre une classe F et une classe E) et d’échapper à certaines sanctions (par exemple, l’impossibilité de louer un logement classé G depuis 2025). Dans un DPE de complaisance, le professionnel du diagnostic triche sur certaines données (surface légèrement réduite, isolation surestimée, système de chauffage minimisé…) ou ferme les yeux sur des défauts, afin d’améliorer artificiellement l’étiquette finale. Ces pratiques sont évidemment interdites et contraires à l’éthique, mais elles existent de manière plus répandue qu’on ne le pense.

En effet, les analyses convergent pour estimer qu’environ 3 à 4 % des DPE seraient ainsi surévalués de façon frauduleuse. Appliqué au parc immobilier français, cela représente plus d’un million de logements concernés. Ce surclassement se produit surtout aux seuils critiques des étiquettes : par exemple, près de 19 % des logements théoriquement classés F se retrouvent notés E, environ 6 % des G passent en F, et 5 % des E passent en D. La tentation de gagner une lettre est donc bien réelle. À noter que la réforme de 2021 a apporté des progrès : le Conseil d’analyse économique (CAE) a constaté que 3,9 % des DPE délivrés avant 2021 semblaient manipulés, contre seulement 1,7 %après l’entrée en vigueur de la nouvelle méthode de calcul. Malgré ces améliorations, avec environ 4 millions de DPE effectués chaque année, on estime qu’encore 70 000 diagnostics sont frauduleusement surclassés tous les ans (chiffre probablement sous-estimé).

Erreurs et incohérences involontaires

Toutes les incohérences de DPE ne sont pas des fraudes délibérées. Il arrive qu’un diagnostic comporte des erreurs sans intention de tromper : on parle alors d’inexactitudes ou d’erreurs techniques. Le DPE est un exercice complexe, basé sur de multiples données (année de construction, matériaux, équipements, etc.) et une méthode de calcul pointue. Une simple faute de saisie ou un relevé incomplet peut fausser le résultat. Par exemple, si le diagnostiqueur mesure mal la surface habitable, oublie de comptabiliser une isolation existante, ou se trompe dans la catégorie d’un système de chauffage, le score énergétique s’en trouvera erroné. Parfois, c’est l’outil logiciel lui-même qui est mal paramétré ou utilisé trop vite, entraînant des résultats incohérents. Ces erreurs ne relèvent pas de la malhonnêteté, mais de l’erreur humaine ou de la complexité du bâti. Néanmoins, même involontaires, elles peuvent avoir des conséquences sérieuses si le DPE erroné n’est pas corrigé à temps.

Outre les fraudes intentionnelles, ces erreurs techniques sont nombreuses et entachent la fiabilité globale du DPE. En d’autres termes, un DPE « faux » n’est pas toujours synonyme de fraude : il peut simplement résulter d’une mauvaise évaluation. On retrouve encore de nombreuses incohérences de ce type dans les rapports, ce qui alerte les pouvoirs publics sur la nécessité d’améliorer la qualité des diagnostics.

Problèmes fréquents à l’origine d’un DPE faux

Fraudes volontaires ou erreurs involontaires, plusieurs dysfonctionnements types reviennent souvent dans les diagnostics de performance énergétique :

  • Données techniques inexactes : informations d’isolation, de surface ou d’équipements mal relevées. Par exemple, une isolation déclarée absente alors qu’elle existe (ou inversement), un type de chaudière mal identifié, etc. De telles erreurs de saisie faussent directement le calcul du DPE.
  • Mauvaise utilisation du logiciel DPE : chaque DPE est généré par un logiciel réglementé. Si le diagnostiqueur choisit un paramètre inadéquat (par exemple un climat local différent de la réalité, ou un scénario d’usage erroné), le calcul final sera biaisé.
  • Biais d’interprétation : deux professionnels différents peuvent évaluer différemment certains éléments plus subjectifs (etat de l’isolation, ventilation…). Ce manque de standardisation peut conduire à des écarts de notation, exploités par ceux qui voudraient optimiser le résultat à leur avantage.
  • Absence de contrôle ou de relecture : un DPE réalisé trop rapidement, sans vérifications croisées, risque de comporter des incohérences évidentes non détectées avant la remise du rapport. L’absence de relecture ou de second regard favorise les erreurs qui auraient pu être évitées.

Les contrôles officiels confirment la fréquence de ces anomalies. La DGCCRF (répression des fraudes), dans son bilan 2022, a relevé des irrégularités dans 75 % des 355 entreprises de diagnostic immobilier contrôlées. Certes, toutes ne portaient pas sur le contenu des DPE (beaucoup concernaient des manquements administratifs ou des manques d’indépendance), mais ce chiffre illustre le besoin de rigueur et de fiabilisation du secteur.

Conséquences et risques en cas de DPE erroné

Un DPE faux, qu’il résulte d’une fraude ou d’une erreur, peut entraîner des conséquences importantes. Sur le plan juridique, depuis que le DPE est juridiquement opposable, un acheteur ou locataire trompé par un diagnostic erroné peut engager la responsabilité du vendeur, du bailleur ou du diagnostiqueur. Des sanctions peuvent aller jusqu’à l’annulation de la vente ou du bail pour vice du consentement (le contrat ayant été signé sur la base d’une information fausse). Les tribunaux accordent aussi régulièrement des dédommagements financiers aux victimes, et des poursuites pénales sont possibles en cas de fraude avérée (fausse déclaration intentionnelle). Pour les diagnostiqueurs, une fraude peut conduire à la perte de leur certification professionnelle et à des amendes lourdes. Sur le plan économique, les propriétaires qui se fient à un DPE surcoté risquent de surestimer la valeur de leur bien ou de négliger des travaux indispensables ; à l’inverse, un DPE trop pessimiste et erroné peut freiner une vente ou une location à tort. Sur le plan de la confiance, enfin, ces dérives entament la crédibilité du DPE. Si acheteurs et locataires commencent à douter systématiquement des étiquettes énergétiques annoncées, c’est tout l’effort de transition énergétique et de transparence du marché immobilier qui est compromis.

Prévenir les fraudes et fiabiliser son DPE

Heureusement, des solutions existent pour limiter ces fraudes et incohérences. En amont, la formation et la déontologie des diagnostiqueurs sont essentielles : un bon professionnel doit respecter strictement les méthodes de calcul et refuser toute pression pour modifier un résultat. Côté propriétaires, il est crucial de fournir des informations exactes lors du diagnostic (factures, plans, etc.) et de ne pas chercher à influencer le technicien. Du point de vue des pouvoirs publics, les contrôles sont intensifiés : environ 3 000 DPE ont fait l’objet d’un audit qualité en 2023, et l’objectif est d’atteindre 10 000 audits par an dès 2025. L’intelligence artificielle sera même mobilisée pour détecter automatiquement les DPE douteux.

Pour les particuliers soucieux de vérifier la fiabilité de leur DPE, des outils technologiques innovants apportent un regard objectif. KRNO, par exemple, est une plateforme d’analyse en ligne basée sur l’intelligence artificielle et les données ouvertes, qui détecte automatiquement les anomalies et incohérences dans un diagnostic. À partir du DPE existant, l’outil évalue sa fiabilité selon plusieurs critères (cohérence des données techniques, halo d’incertitude autour de l’étiquette, conformité réglementaire, etc.). En quelques clics, vous pouvez ainsi faire analyser gratuitement votre DPE : le rapport KRNO signalera les signaux faibles d’un DPE douteux et donnera un verdict clair sur la fiabilité de votre étiquette (par exemple « Lettre justifiée, halo resserré » si tout est cohérent). En utilisant une solution de ce type, vous vous prémunissez contre les mauvaises surprises, pouvez faire corriger un DPE erroné avant qu’il ne vous porte préjudice, et in fine contribuez à rétablir la confiance autour des diagnostics de performance énergétique.

Sources :

  • Conseil d’analyse économique (CAE) – Études statistiques sur les DPE surévalués et impact de la réforme 2021
  • DGCCRF – Bilan 2022 des contrôles des diagnostiqueurs immobiliers

Read more